L’exposition universelle de 1937, entre progrès et tensions

Inaugurée en mai 1937 par l’actuel président de la République Albert Lebrun, Paris accueille à nouveau l’exposition universelle qui se déroulera jusqu’au 25 novembre de la même année. Très importante pour l’époque, cette édition de 1937 est bien différente des précédentes expositions universelles de 1889 et de 1900 qui ont aussi eu lieu à Paris.

Le progrès et la modernité, au cœur de l’exposition

52 pays exposants ont accueilli plus de 31 millions de visiteurs sur une centaine d’hectares allant de la colline de Chaillot à la place d’Iéna. Les pavillons de chaque pays sont un peu moins traditionnels pour cette édition de l’exposition universelle. L’exposition est considérée comme une exposition internationale des arts et des techniques appliqués à la vie moderne. Les productions sont donc plus artistiques et assez nouvelles dans leurs approches. L’exposition de 1937 est un vrai concours d’architecture ! L’art et le beau sont associés et on veut montrer que la technique peut être artistique.

De nouvelles constructions architecturales

La plupart des bâtiments servant à l’exposition sont temporaires et ont donc été démontés à la fin de l’exposition. On note cependant quelques exceptions toujours existantes à Paris aujourd’hui. Trois palais sont construits pour l’événement. Le palais de Chaillot remplace l’ancien palais du Trocadéro que l’on détruit. On construit le palais de Tokyo qui accueille le Musée d’Art Moderne et le Palais d’Iéna (pavillon des Travaux Publics).

La Tour Eiffel se voit modernisée, on supprime les arcades du premier étage et on investit dans un nouvel éclairage. On double également la largeur du pont d’Iéna.

Une exposition sous haute tension

Le climat est tendu en Europe. On sent venir la montée au pouvoir du fascisme et du nazisme. Le Front populaire est au pouvoir en France, pays qui subit encore les difficultés suite à la crise économique de 1929.  La Seine est en crue en ce début d’année. Toutes ces tensions vont se ressentir lors de l’exposition.

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Pavillon de l’URSS

Une des manifestations les plus marquantes des conflits est matérialisée par le pavillon allemand et le pavillon russe, les deux bâtiments se font face aux abords du pont d’Iéna. Les valeurs communistes sont défendues par l’ouvrier et la kolkhozienne d’un côté tandis que l’aigle allemand et la croix gammée défendent le travail allemand. L’idéologie de l’art nazie était exposée dans le pavillon à travers des sculptures et des produits de l’industrie allemande. Le pavillon soviétique était surmonté d’une statue d’un couple : l’ouvrier et la kolkhozienne avec la faucille et le marteau, exemple du réalisme socialiste. L’intérieur du pavillon était assez politisé et consacré à la propagande. Ce face à face est resté dans toutes les mémoires. Les deux pavillons illustraient la même conception totalitaire de l’art, d’un art officiellement populaire et national. Chacun de son côté souhaitait proclamer la supériorité de son système politique. Pavillons allemand et soviétique étaient construits avec une base métallique et ont tous les deux reçus une médaille d’or. Cette exposition universelle de 1937 était un peu perçue comme le dernier espoir pour la paix en Europe, sous les yeux de la Tour Eiffel.

Les œuvres artistiques qui ont marqué l’exposition

Le pavillon espagnol commande, en 1937, une grande composition murale à Picasso. La guerre civile en Espagne a débuté l’année précédente. Picasso, alors jeune peintre, s’inspire de l’actualité politique de son pays pour peindre. Il apprend en novembre 1937 le bombardement de Guernica par les troupes allemandes. En effet, en avril 1937, le général Franco, en pleine guerre civile, appelle à la rescousse l’aviation nazie qui bombarde la ville de Guernica, faisant plus de 2000 morts. Très indigné, Picasso décide d’en faire le sujet de sa peinture qui deviendra mondialement célèbre, considérant que le sujet avait une valeur universelle de condamnation de toutes les guerres. Avant d’être appréciée, son œuvre fera l’objet de vives critiques puisque sa toile est engagée. Picasso résidait alors en France et s’était juré de ne plus retourner en Espagne tant qu’elle était sous la coupe de Franco. Il a voulu faire don de son œuvre aux Espagnols dès que la liberté serait de retour en Espagne. Guernica n’a donc rejoint l’Espagne qu’après la mort de Franco en 1981.

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Tableau de Picasso : « Guernica »

Le pavillon français a aussi été remarqué par la fresque de Raoul Dufy. « La Fée Electricité » de 600m2 associe la magie et l’art à l’industrie et l’électricité. L’œuvre a été commanditée par la Compagnie Parisienne de Distribution d’Electricité. Cette œuvre est toujours visible aujourd’hui au Palais de Tokyo.  

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Malgré une exposition universelle sous tension, les innovations de cette exposition ont pu susciter l’intérêt des curieux, l’idée des voitures électriques est évoquée, il faudra encore un peu de patience pour les voir circuler dans la capitale.

Béatrix Benoist d’Anthenay


A propos Béatrix Benoist d'Anthenay

Rédactrice digital nomade, écrit pour le blog depuis 2019.

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